Une nouvelle aube se lève (Pv : Clive, Drake, Azuno, Sasha)

Ma carrière de marine paraissait débuter. On m'avait convoqué pour un matin alors que j'étais en plein boulot. Un marine me conduisit jusqu'au bureau du Colonel Hisagi. Avant les salutations, il m'annonça que j'aurais une mission aux côtés de deux autres marines. Au début, je pensais qu'il souhaitait me voir pour une corvée supplémentaire mais lorsque je sus que c'était pour une mission, je ne pus que m'empêcher de sauter de joie. J'avais frotté des cuvettes de toilettes, lavé des parquets, participé à la conception des repas tout en étudiant la médecine, la mécanique et améliorant mes capacités physiques. Ma vie avait été terrible depuis mon arrivée chez les marines. Je m'étais montré persévérant jusqu'au bout et cette persévérance allait payer. Le Colonel m'annonça le lieu où je devais rencontrer mes deux équipiers avant de me permettre de disposer. Enfin, après tous ces efforts, j'allais recevoir ma première mission. C'était un tournant important de ma vie car si j'échouais, je pouvais dire adieu pour une montée de grade.

Étant une personne sérieuse et ponctuelle à tout rendez-vous, je me préparai pour ma rencontre avec l'adjuvant Jackson et le marine inconnu. Comme d'habitude, je ne pouvais pas me séparer de ma boîte de premiers secours et de mes instruments de médecine. Tout médecin digne de ce nom ne se baladerait jamais sans son matériel.

*C'est parti pour une nouvelle aventure mon vieux.*

Cela faisait longtemps que je n'étais pas sorti en dehors d'une base de la marine. Vivre à l'intérieur était comme être un prisonnier avec un logement et de quoi vivre. Pendant que je me dirigeais vers le bar, je remettais en question mon destin. Étais-je si sûr de moi ? Le Colonel ne m'avait sûrement pas envoyé vers une mort certaine mais je ne savais pas si j'étais certain de pouvoir braver la mort à nouveau. Le professeur Vladimir Von Korezen m'avait permis de vivre à nouveau : pourquoi devrais-je me tourner vers une guerre qui n'est pas mienne ? Mais à ce moment-là, je compris à quel point j'étais devenu sot. Le monde entier était pris dans un conflit. Si cela se trouvait, je vivais encore pour accomplir ce destin. Pour me battre. J'avais survécu parce que le monde avait besoin de moi. Cependant, nous pouvions comparer mon raisonnement à celui d'un fou. Malgré ça, j'étais prêt à foncer tête baissée vers le futur. Après tout, je devais cette partie de mon existence à la Marine.

*Me voilà à destination*

Je n'appréciais pas les bars. Pour certains, c'était un paradis terrestre, l'endroit où l'on trouvait des catins et de l'alcool et ce bar était constitué essentiellement de pirates, de deux ou trois marines et de marins. Généralement, des combats d'ivrognes, de pirates et quelques fois de pirates contre marines. Etant un marine, j'avais de fortes chances de me faire casser la gueule. En un coup d'oeil, j'ai trouvé l'Adjuvant Jackson. D'un geste rapide, je tentai de lui avertir que je me trouvais dans la salle. Je m'approchai de lui puis je m'assis à ses côtés.

"Bonjour, je me nomme Drake Phoenix. Vous m'avez sûrement attendu."

Après cette courte phrase, j'attendis une réponse de sa part et l'arrivée du troisième membre du groupe. Souriant à mon supérieur, rougissant parce que j'étais une personne timide, je me demandais quel genre de personne pouvait être Clive R. Jackson. Un personnage autoritaire, gentil ou faible ?

Une noble, réduite à éplucher des patates et récurer des toilettes. Franchement, j'aurais tout vu. Je jurais intérieurement. Tellement d'ailleurs qu'on pouvait presque sentir une aura négative émaner de mon corps. J'espérais juste que mes géniteurs la sentiraient autant que ma voisine de corvées, qui semblait commencer à légèrement pâlir devant une telle démonstration de violence à l'encontre de ces pauvres pommes de terre. Après quelques heures où j'avais passé mon temps à m'écorcher les doigts avec cette saloperie de couteau (parce que oui, comme on peut s'en douter, ce n'était pas une tâche que j'exécutais souvent), Dieu (ou une quelconque volonté divine) sembla avoir entendu mes prières : une missive. J'allais ENFIN sortir de ces cuisines. Pour faire quoi ? Je n'en savais fichtrement rien. Mais ça ne pouvait pas être pire que ce que je faisais actuellement.

Je me mis tranquillement à lire le bout de papier. "Blah blah blah, suite à une discussion avec monsieur Stegalkin, et ayant remarqué vos récents efforts blah blah blah vous partez donc en mission blah blah blah vous serez accompagnée de trois autres personnes, dont l'adjudant Jackson blah blah blah présentez la lettre ci-contre pour attester votre participation blah blah blah." En résumé, je m'étais implicitement faite pistonnée. Il fallait croire qu'il restait encore un peu de compassion à mon père... Et du fric surtout. Parce que bon, pour faire régulièrement de telles donations, il ne devait vraiment rien avoir à faire d'autre avec.

Maintenant, il ne restait plus qu'à prouver que je n'étais pas que la fille à papa qui obtenait tout d'un petit claquement de doigts. Je devais faire mes preuves. Mon égo avait besoin de victoires pour se refaire une beauté, les corvées de patates ne lui ayant pas forcément réussi (et le récurage des toilettes encore moins). Bref. Je me levais donc telle une fleur et me mis en route rapidement. Il n'y avait aucun intérêt à s'attarder plus longtemps derrière les fourneaux. Sur le chemin, je faisais pianoter mes doigts dans le vide, comme si j'avais réellement un instrument entre les mains. Ça faisait passer le temps, la marche semblait moins longue. Je me rendis accessoirement compte que jouer de la musique me manquait.

Ce fut ainsi qu'arborant fièrement (ou pas) un logo discret de mon appartenance à la marine, je rentrais dans le lieu du rendez-vous (auquel je n'étais pas conviée au départ, mais ça, c'est un détail !). Je regardais discrètement à droite, à gauche, le regard désinvolte au possible face aux ivrognes qui squattaient le coin. Je repérais finalement une tête blonde, accompagné d'un autre compère. Uniformes. Ce sont eux. En même temps, l'adjudant Jackson ne passait jamais inaperçu dans les couloirs, alors forcément, je savais à quoi ressemblait sa tronche. Ils ne devaient pas être trois d'ailleurs ? Peut-être un retardataire. Je haussais les épaules l'air de rien. Mes longs cheveux d'argent firent leur effet, sans trop attirer l'attention. En même temps, j'étais habillée comme un sac à patates. Une tenue style week-end, chaussures plates... Mon petit mètre cinquante-sept ne faisait pas belle figure aujourd'hui. En fait, je ne voulais en aucun cas être assimilée aux filles qui nourrissaient une peur inexplicable à l'encontre des ongles cassés (c'était une image, évidemment). Surtout pas pour ma première mission en dehors de la base. Ouais parce que contre toutes les attentes, j'avais un minimum (pas qu'un minimum à vrai dire) de dignité à entretenir. Enfin au niveau des deux hommes, je pris silencieusement place à leurs côtés.

« Bien le bonjour messieurs. Sasha Stegalkin, parti... »

... Cipante de dernière minute. Ouais, je venais de me faire royalement interrompre par une bagarre et un homme qui semblait crier à l'aide. Je n'avais même pas eu le temps de déplier cette foutue lettre. D'ailleurs, du coup, peut-être qu'on me prenait pour la troisième personne officiellement conviée (à tort, certes). Je tournais la tête, regardant la scène d'un œil consterné, ne semblant pas le moins du monde encline à bouger mon cul maintenant qu'il était posé. La taille imposante de la victime rendait la scène d'autant plus comique. Facepalm.

J'étais mal à l'aise. Le blond que j'avais repéré du premier coup d’œil, n'avait pas daigné me saluer. Observant timidement le sol, mon visage n'arrêtait pas de rougir. Je n'arrivais jamais à contrôler mes battements de coeur. C'était sûrement parce que c'était le début de ma première mission que je réagissais comme un gosse. C'était pas croyable. En tout cas, celui qui je soupçonnais être l'Adjuvant Jackson, peut-être à cause de son allure et son regard dur, m'avait lui aussi aperçu. Tel un enfant qui s'était perdu, une joie incompréhensible s'est dessinée sur mon visage. Je ne m'étais pas trompé de bar. Je n'avais pas l'habitude de ce genre d'endroit. Des ivrognes titubaient de gauche à droite, en beuglant ou en chantant des mots incompréhensibles. Un homme, sûrement ivre, s'effondra à quelques mètres de moi et vomis une espèce de purée. Détournant le regard de ce pauvre inconnu, une autre personne, un marine entra dans l'endroit. En regardant de plus près, c'était une marine. Personnellement, je n'étais pas sexiste mais je n'avais pas encore eu la chance de rencontrer une femme dans la base. Pour moi, c'était comme si je n'avais pas vu une personne du sexe opposée depuis des lustres.

Cette demoiselle allait se présenter lorsqu'une voix, d'un homme selon moi, l'empêcha de continuer. Ce cri de sauvetage attira l'attention de presque tout le monde. Un marine de grande taille, on dirait tailler pour le combat, était entouré d'ivrognes. Même si j'avais un sens de la justice, j'observais en enfant bien sage, un ordre de l'adjuvant. Je n'osais pas me lever avant même qu'il ne m'en ait donné l'autorisation. C'était le chef d'équipe. Je ne pouvais pas gâcher mon occasion de réussir cette mission. Cependant, je n'eus pas à attendre longtemps. Notre capitaine parvint à faire fuir les ivrognes avec une facilité déconcertante. C'était impressionnant. Le pouvoir de la Marine et du Gouvernement Mondial se révélait être plus imposants que prévu. Avec des yeux brillants, j'admirais le capitaine Jackson. Même s'il n'avait pas encore ce titre, je me disais qu'il avait l'étoffe d'un capitaine malgré son mauvais caractère. Oui. Il avait un mauvais caractère. C'était un homme magnifique en terme de beauté mais détestable. Une personne polie aurait répondu avec courtoisie.

*Que nous a-t-il réservé ?*

Le dernier membre de notre petite troupe apparut et nous rejoignit. Sans prévenir, Jackson s'autorisa à nous donner un surnom à chacun. J'avais pris un certain temps avant de comprendre qui était le gosse timide. Il devait faire référence à moi. Encore plus timide qu'à mon entrée, j'ai recommencé à rougir sous ce surnom. Bref, il sauta avec rapidité les présentations et tenta de faire de l'humour. Du moins, c'est ce que je compris. Notre chef de groupe décida de faire un petit topo de notre mission. Magnifique. Avec un long soupir de soulagement, je me réjouis d'apprendre que notre mission ne se révélait pas être une corvée mais un véritable affrontement face à des pirates. Je rêvais depuis des lustres de tester mes capacités. Depuis peu, mon corps "robotique" m'avait doté d'une force exceptionnelle et mon esprit ne cessait pas de me démanger. J'avais une grosse envie d'utiliser mon fruit du démon et les techniques que j'avais créé.

Mon coéquipier était "l'homme-bonbon". Je ne savais pas s'il était digne de confiance après la scène qu'il avait fait. Nous allions dans une forêt et ce n'était pas une partie de plaisir. Après le discours de notre chef, je craignais de finir déchiqueter sous les crocs d'animaux sauvages après avoir été abandonné par mon compagnon. Cependant, l'un des côtés de mon âme me suggéra de lui faire confiance. Après tout, pourquoi l'avait-on choisi pour cette mission, si l'on ne le jugeait pas digne de confiance ? Finalement, après ce débat mental, je préférai laisser le destin choisir pour moi, comme d'habitude.

"Je n'ai aucune objection. Nous pouvons y aller.*me tourne vers mon équipier* Drake Phoenix, enchanté. J'espère que cette mission sera un succès."

Avec un sourire sincère, j'observais de haut en bas mon équipier. Tout à l'heure, je n'avais pas eu la chance de le regarder avec autant de précision. Il avait une carrure plus étonnante que la mienne. Pourtant, il n'avait pas osé se battre. Il devait peut-être cacher une étrange capacité. Malheureusement, je n'eus pas le temps d'y songer. Mon esprit combatif se réveillait peu à peu. Je désirais arriver en premier à destination, dans le repère des pirates. A ce moment-là, la compétition venait de juste de commencer.

Il m'était impossible de retourner en arrière. Mon équipier connaissait désormais ma véritable identité. Si je fuyais en plein milieu de cette mission, j'étais certain qu'il n'hésiterait pas une seconde à me dénoncer. Cependant, Azuno ne semblait pas être une personne désagréable. Les personnes qui aimaient les bonbons, n'étaient pas forcément mauvaise. Malgré tout, ma timidité m'empêchait de lui adresser la parole. J'avais beau avoir acheté un livre permettant aux gens tels que moi de communiquer avec autrui mais je ne parvenais pas à appliquer les formules. Enfin bref, le chemin jusqu'à la forêt se fit dans un silence ennuyant. Aucun de nous deux n'était visiblement décidé à parler. Pour ma part, je me contentais d'avancer pour effectuer docilement ma mission. Par contre, au fond de mon être, je ne voulais pas rester un simple chien enchaîné au service de la marine, je voulais être admiré et respecté par mes pairs.

La forêt se dressa subitement devant nos yeux : les arbres étaient épais comme d'immenses barrières, il était impossible de distinguer ce qui se trouvait de l'autre côté à cause d'une brume constituée de neige et l'on pouvait entendre le bruit d'animaux sauvages. J'apercevais dès mon entrée dans cette terre inconnue, de temps à autre, des pattes, des mouvements dans l'obscurité de la forêt, sans savoir si c'était le fruit de mon imagination ou non. La présence d'Azuno me permit de ne pas trop avoir peur et me donnai l'envie de me montrer courageux. J'avançais avec des pas rapides en repoussant avec force les feuilles ou les branches qui se dressaient en travers de mon chemin. Au bout d'un certain moment, je compris que tout le bruit que je produisais, allait se retourner contre moi. Effectivement, une meute de cinq loups sauvages décida de se mettre en face de mon compagnon et moi.

*Oh super ! Des bêtes viennent nous rendre visite juste pour nous bouffer. Qu'est-ce qu'ils sont gentils !*

Il n'y avait rien de drôle pourtant. Les canidés étaient agités et nous surveillaient en se méfiant. Sans rien prévoir, le chef de meute qui se trouvait au milieu poussa un étrange hurlement. C'était le signe qu'il était temps de se lancer à la chasse. Le chef se lança sur moi ainsi que l'un de ses loups tandis que les autres attendaient en arrière. C'était triste. Les animaux sous-estimaient trop les hommes.

- Je m'occupe d'eux Azuno. Ne fais rien.

Je mis mon poing légèrement en arrière pour me préparer à une contre-attaque. Le gros loup sauta sur moi, la gueule bien ouverte montrant ses crocs tranchants. Avec une précision et une bonne vitesse, je lui décochai une droite dans le museau. La pauvre bête se retrouva propulser en arrière et son corps percuta de plein fouet le tronc d'un arbre massif. Cependant, le loup qui suivait son chef en profita pour me mordre le bras. Quelle bêtise ! Les dents du canidé se brisèrent en un instant. Il ignorait que j'étais constitué d'un corps aussi résistant. Pour éviter qu'il se montre plus agressif ou une autre réaction, je lui donnai un rapide coup de pied dans le crâne à lui aussi qui l'envoya valser.

- Alors, qu'allez-vous faire ?

Les trois autres loups m'observaient avec crainte. Ils devaient se demander quoi faire face à moi. Au lieu de battre en retraite, ils décidèrent de se lancer tête baissée sur Azuno. Pas de problème. Je voulais surtout voir ce dont il était capable. Si par malheur le marine n'était pas de taille face à ces bestioles, je lui montrerais qu'il n'y avait pas de place pour les faibles au sein de la Marine. Sortant rapidement ma boîte de secours, je comptais bander ma fausse blessure pour éviter que l'on découvre que j'étais un cyborg.